Sleiman à " Ici Beyrouth ": “Une nouvelle stratégie défensive devrait confier les armes à l’autorité exclusive de l’État dans un délai d’un an”
Michel Hajji Georgio
L’ancien président de la République Michel Sleiman a plaidé mardi, dans le cadre d’un entretien exclusif à Ici Beyrouth, en faveur d’une stratégie de défense fondée sur la Déclaration de Baabda (2012), centrée sur le principe de neutralité du Liban, et prévoyant un calendrier d’un an pour que les armes soient confiées à l’autorité exclusive de l’État libanais par le biais du Conseil supérieur de défense.
Commentant l’appel du président de la République Michel Aoun en faveur d’un dialogue national sur la stratégie de défense, le général Sleiman a estimé que “la proposition d’une stratégie de défense aujourd’hui vient beaucoup trop tard, que ce soit dans la forme ou sur le fond pour une série de raisons”.
“Pour adopter une stratégie de défense, il faut d’abord lui élaborer un cadre politique. Ce cadre a été élaboré à travers la Déclaration de Baabda, avant que je ne soumette ma conception de cette stratégie en 2012”, a affirmé l’ancien chef de l’État, rappelant que “la déclaration (de Baabda) avait mis l’accent sur la nécessité de la neutralité du Liban, du contrôle de la frontières avec la Syrie et du refus de toute zone tampon facilitant l’infiltration de miliciens et la contrebande d’armes, le tout sur une durée de deux ans”. “La Déclaration avait été adoptée le 11 juin 2012 à l’unanimité, et, deux mois plus tard, j’avais proposé le document comportant ma conception de la stratégie de défense”, souligne-t-il.
Michel Sleiman note par ailleurs que “le président de la République ne se base pas sur la Déclaration de Baabda dans le cadre de son appel au dialogue national, alors qu’il l’avait approuvée, ainsi que le Courant patriotique libre, avant d’emboîter le pas au Hezbollah et de la désavouer ouvertement par la suite”.
Une autre difficulté, souligne Michel Sleiman concernant l’élaboration d’une stratégie de défense, est que “le Hezbollah insiste à s’ingérer dans les affaires extérieures du Liban”. Il rappelle dans cadre, mais aussi dans un contexte purement libanais, les propos du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, lors du 7 mai 2008, selon lesquels “les armes sont là pour protéger les armes”. L’ancien président rappelle aussi que le Hezbollah rejette l’initiative de paix arabe du roi Abdallah adoptée par l’État libanais lors du sommet arabe de 2002 à Beyrouth, qu’il occulte au profit d’ “une stratégie d’attaque pour libérer la Palestine”.
Pour l’ancien commandant en chef de l’armée, “le timing de l’appel au dialogue du président Aoun est également mauvais”. " Cet appel intervient trop tard, à la fin du mandat présidentiel et à la veille des élections législatives et municipales et de l’élection présidentielle. Or cela conduit à ne pas accorder suffisamment d’attention à une question stratégique cruciale comme celle de la stratégie défensive. De plus, les résultats de n’importe quel dialogue mettront du temps à apparaître et prendre forme”, dit-il, avant de souligner que tout dialogue ne saurait être initié sans la présence " d’une bonne partie des factions ou de la majorité d’entre elles ".
Mais il y a plus grave, selon lui. “La stratégie de défense conformément au concept qui prévalait entre 2006 et 2012 n’est plus opérationnelle aujourd’hui. L’économie du pays s’est effondrée, ses institutions sont en faillite, et tous les piliers de sa force ont été ébranlés. Si elle devait être proposée aujourd’hui, elle devrait l’être avec les mesures d’application de la neutralité sur base de la Déclaration de Baabda”, insiste-t-il.
Et l’ancien président de conclure: " Cette stratégie devrait se résumer aujourd’hui à un calendrier d’un an tout au plus pour l’abandon des armes, durant lequel le commandement de ces armes et leur utilisation seraient confiés à l’autorité exclusive de l’État libanais, par le biais du Conseil supérieur de défense.